21 juillet 2009
Comment ne pas succomber au charme d’une ville quand on est accompagné d’un guide aussi passionnant que passionné?!... C’est ainsi que nous avons découvert Malacca, ville classée au patrimoine mondial de l’humanité depuis un an. Dernier bastion de notre visite sur le versant ouest malais avant de rejoindre la route cotière de l’est du pays. En chemin, nous avons observé une trêve en milieu naturel, dans le plus grand parc national appelé Taman Negara. Une forêt dont seulement 5% du territoire est ouvert au public. C’est peu et c’est beaucoup à la fois quand tout apparaît surdimensionné!
Malacca ou Pomme d’amour
Le rendez-vous est pris de longue date. A notre arrivée à Malacca, nous garons Hachille à l’ombre d’un palmier, dans le quartier chinois, puis rejoignons l’une des rues principales où nous attend Serge Jardin, notre guide pour les deux prochains jours dans la ville.
Un chapeau de paille, une barbe qui au toucher apparemment porte bonheur, une voix si douce que l’oreille se tend en permanence, et surtout une capacité à vous conter des histoires qui vous emportent loin de tout, tel est le portrait que l’on peut dresser de Serge Jardin en quelques mots, enseignant en histoire, puis guide en Afrique, en Amérique Centrale et enfin en Asie du sud-est. Une rencontre passionnante pour découvrir la ville de Malacca que nous n’aurions sans nul doute pas pu apprécier de la même façon.
Serge a prévu deux visites, L’une historique, l’autre culturelle. La première nous apprend que Malacca connut ses heures de gloire principalement entre le XVe et XVIIIe siècles.
Dans les grandes lignes… Malacca tire son nom de l’arbre décoratif “Pommier d’amour” sous lequel s’abrita un prince hindou de Sumatra, fondateur de la ville en 1400. Le port occupe alors une position stratégique dans les échanges entre la Chine, l’Inde et l’Occident. Comme l’explique Serge, la Chine servit de parapluie, donc de protecteur, à Malacca au XVe siècle avant de tomber dans l’escarcelle des portugais, puis des hollandais, et enfin des anglais, et ce jusqu’en 1957, année d’indépendance de la Malaisie.
Tout en nous contant l’histoire, Serge nous emmène sur un parcours ponctué d’arrêts devant les principaux monuments comme par exemple, Town Square où les hollandais construisirent en 1641 l’hôtel de ville, aujourd’hui transformé en musée.
Autour du bâtiment central, mélange d’architecture hollandaise et anglaise, on trouve également une église, un beffroi, et une fontaine érigée en l’honneur de la grande reine Victoria.
Chose amusante, il règne un bazar sans nom autour de Town Square. Outre une circulation effrenée et de nombreux visteurs, des tuks tuks décorés de mille et une façons se baladent, au son d’une musique saturée.
Parés de fleurs en plastique et de guirlandes (les faisant ressembler à de véritables sapins de Noël la nuit d’ailleurs!), les chauffeurs sont récompensés chaque année lors du concours du plus beau tricycle.
Comment alors ne pas sourire devant les efforts réalisés par chacun d’entre eux pour faire de leur tuk tuk le plus beaux des tuks tuks!!
Au sommet de la ville, se dresse les ruines de l’église St Paul bâtie par un capitaine portugais.
Transformée à l’arrivée des hollandais, puis abandonnée pour devenir ensuite avec les anglais un entrepôt à munitions, l’église apporte un magnifique point de vue sur Malacca et son détroit. A l’intérieur des ruines, on trouve encore des pierres tombales et une crypte où reposa quelques jours le corps du saint homme François Xavier, missionnaire vénéré encore aujourd’hui par les fidèles.
Serge en profite pour nous conter deux miracles qui apportent à ses récits une touche de mystère et nous permettent d’écarquiller encore un peu plus les yeux. Pas de doute, Serge sait nous tenir en haleine! Au pied de la colline, un vestige d’importance: La porte de Santiago, autrefois porte principale de la forteresse portugaise, sauvée de justesse par le fondateur de Singapour, Sir Thomas Raffles au XIXe siècle.
Il y a bien sûr beaucoup de choses à voir, à faire, à vous raconter aussi, sur Malacca. Malgré un temps limité, nous faisons le lendemain la visite dite “culturelle”.
Outre l’architecture des maisons malaises et chinoises dans lesquelles nous retrouvons le style de ces shophouses (maisons-commerces).
Les portes de bois parfois sont de véritables chefs d’oeuvre, Serge nous emmène à Chinatown, dans le quartier des artisans où nous croisons par exemple la route d’un tonnelier.
L’homme est le dernier de la lignée à réaliser avec des méthodes ancestrales les tonneaux de bois. Tout comme en Europe auparavant, l’industrie du plastique a supplanté la fabrique de ces objets.
Mais reconnu depuis une dizaine d’années, les techniques et savoirs-faire devraient un jour réapparaître. Géraldine découvre également deux instruments essentiels dans la vie des chinois: Le cure-dents et cure-oreilles (deux en un) et la rappe à langue, fabriqués en argent. Des objets magnifiques, presque de déco, que nous trouvons dans une bijouterie artisanale.
Puis la fabrique des galettes de riz pour les nems; 35 kg de pâte pour permettre à tout le quartier d’avoir dans son assiette des nems!... Ça fait combien de galettes au total?...
Autre amusement, les vendeurs d’objets dédiés aux temples. Si l’encens, les bougies et faux billets n’ont plus de secret pour nous, en revanche quelle ne fut pas notre surprise de découvrir une quantité d’objets réalisés en papier, de toute taille et de toute sorte, à brûler sur la tombe des ancêtres ou dans les fours des temples comme des tongs, des motos, des appareils photos,etc…
L’année passée, les morts recevaient beaucoup de sous-vêtements.
Cette année, ce sont les scooters et motos qui sont à la mode! Comme quoi, les morts continuent à consommer comme nous!
Vient le tour d’autres monuments, symboles de la diversité ethnique de Malacca. Les mosquées, comme l’éclatante Kampung Kling, ont un style bien à elles, avec leur toît carré à plusieurs niveaux où se mélangent des serpents mythiques d’origine hindoue et leurs minarets de style mauresque.
Les temples chinois, comme le très vénéré Cheng Hoon, célebre sanctuaire aux boiseries scupltées, aux céramiques extraordinaires, dédié à la déesse de la Miséricorde Guanyin, garde son ambiance très familiale.
Ou encore le temple hinddou dédié à la divinité Vinayagar. Serge nous fait voyager sur tous les continents et dans toutes les religions. Pour une fois, nous ne sommes pas trop perdus!
Malaca ne serait pas sans évoquer également le mélange des genres appelé Baba-nonya (commerçants du sud de la Chine mariés aux femmes malaises) ou Chitty (commerçants indiens mariés aux femmes malaises) qui font du style architectural mais aussi de la gastronomie de la ville une renommée particulière.
Pour terminer cette balade accompagnée, Serge nous invite dans son antre, une maison chinoise au design et agencement magnifique.
Baptisée “La maison de l’escargot”, rapport aux indices architecturaux mais aussi à l’animal qui sort puis rentre dans sa coquille, symbole même de l’état d’esprit et la façon de vivre du peuple malais.
Suite et fin de la visite en compagnie de notre conteur: Un dîner dans un village de pêcheurs, à une dizaine de kilomètres du centre ville. Poisson, fruits de mer et vin blanc, nous sommes chouchoutés jusqu’au bout!
Difficile de quitter cette “encyclopédie” mais chacun doit reprendre son chemin…
Nous prenons encore le temps de visiter le quartier traditionnel malais (Kampung Morten) où fut construit notamment les fameuses maisons de bois comme la villa Sentosa, il y a plus de cent ans.
Même le Sultan des sultans s’est assis dans la maison. Nous nous prêtons de bonne grâce à la visite organisée d’Abdullah, descendant direct et propriétaire de la maison, qui, du haut de ses 73 ans, ne cesse de gesticuler et nous raconter force anecdotes, le tout entre deux regards jetés sur le service à thé de son grand-père et les habits de fête de ses parents.
Quel personnage!
En face de la villa, de l’autre côté de la rivière, se dresse une ancienne église de style portugais, l’église St Pierre construite en 1710.
Un dernier coup d’oeil au quartier indien, puis à Town Square, et nous voilà partis de Malacca.
La grande, la fasteuse Malacca, qui s’endormit un jour au profit notamment de Singapour et Penang, pour revivre de nouveau aujourd’hui, grâce à son classement et à ses visiteurs toujours plus nombreux…
Taman Negara, un parc géant!
Nous profitons, avouons-le, de la présence des parents de Yann: Albert, Maryse et Audrey pour nous garer à côté de leurs hôtels ou bungalows et bénéficier de douches ô combien rafraîchissantes. Un luxe en particulier quand on arrive dans le parc (taman) Nagara où l’humidité ambiante fait transpirer davantage!
Nous resterons dans le parc durant trois jours, le temps de l’explorer et participer aux différentes excursions que proposent les guides locaux.
Certes, la saison est propice à l’afflux de visiteurs. Pour être un peu plus tranquilles, nous optons pour des marches plus longues dans la forêt, tout en prenant les sentiers conduisant à des cascades ou à des promenades sur la rivière, comme en témoigne notre vidéo.
L’activité que nous trouvons très ludique est celle que l’on appelle “Rapid shooting”.
Une promenade en pirogue sur les rapides, façon rafting, où l’on en sort bien trempé.
Maillots de bain et appareils photo cachés dans des sacs plastiques, nous profitons pleinement des arrosages successifs de chacun. Un régal sous ce climat étouffant!
Dans le menu de cette excursion est inclus une visite dans l’un des villages aborigènes habités par les Orang Asli.
Très franchement, nous n’en sommes pas forcément contents dans la mesure où nous n’avons pas l’habitude de découvrir de cette façon la culture de ces peuples en deux temps trois mouvements. Dans ce cas de figure, nous avons tendance à culpabiliser! Mais nous y sommes, donc nous nous prêtons à l’exercice. Asri, notre guide, nous explique pendant une petite demi-heure de quelle façon vivent les Orang-Asli. Chasse du petit gibier et cueillette des fruits. Ce sont également de sacrés connaisseurs des plantes. Nous apprenons aussi quels bois sont utilisés pour allumer un feu ou encore comment utiliser une sarbacane pour chasser le gibier.
Les Orangs- Asli, originaires d’Afrique, ne sont actuellement toujours pas intégrés dans la société malaise. Comme beaucoup d’aborigènes dans le monde, beaucoup vivent à présent de l’argent donné par le gouvernement ou récolté par le tourisme pour s’acheter des vêtements, de l’alcool et des cigarettes.
Nous repartons du village assez rapidement, d’autres baignades ou balades nous attendent.
Le Taman Negara, comme toute forêt tropicale, offre un décor impressionnant dans lequel la nature reprend toujours ses droits.
Arbres géants, lianes à l’infini, feuillages ou insectes surdimensionnés, …
Tout est surprenant. Sûrs que nos ongles et cheveux ont poussé plus que de raison pendant ces trois jours!
Nous reprenons la route cette fois vraiment à l’est où plusieurs haltes sur la côte sont prêvues. Sans oublier une pause, toujours familiale, sur les îles Perenthian, un paradis où plages de sable blanc et eaux turquoises se partagent le territoire… Mais cela est encore une autre histoire…